Novembre 10, 2022
Par Collectif Emma Goldman
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Couverture de la version du livre publiée en France

Près de trois mois après sa sortie au Québec, la diffusion du Dictionnaire anarchiste des enfants, auto-produit et passé de manière entièrement autonome (sans commerce), s’avère déjà plus grande que celle des deux ouvrages précédents du Collectif Emma Goldman : Radio X : Les vendeurs de haine (2013) et Combattre l’extrême droite et le populisme (printemps 2020). Un éditeur anarchiste français, l’Atelier de création libertaire, fera sortir le Dictionnaire anarchiste des enfants en Europe à la mi-novembre, mais je souhaitais tout de même, à titre personnel, partager quelques notes quant au monde du livre et de l’édition et aux possibilités qui se sont révélées à travers l’auto-production dans notre expérience. D’abord, il faut rappeler que sur ces trois ouvrages, seul Combattre l’extrême droite et le populisme avait jusqu’à maintenant été publié chez un éditeur (M Éditeur) et vendu en librairie, mais même dans ce cas nous avons tout de même diffusé par nos propres moyens une partie considérable des copies produites (en pleine situation pandémique). Ces trois livres se voulaient des outils à destination des militants et militantes et les activités en lien avec leur promotion étaient pour nous avant tout des occasions de rassemblement, potentiellement porteuses de réseautage et de nouvelles idées et initiatives. Évidemment, la circulation des ouvrages est importante pour que des gens de tous les horizons puissent y avoir accès. Néanmoins, il y a lieu de se demander si la portée des idées et d’un outil est la même lorsqu’un livre est acheté dans les circuits commerciaux versus lorsqu’une forme de contact doit être faite avec un groupe militant (par exemple se déplacer au Salon du livre anarchiste, à une action du Collectif ou à un lancement ou peut-être même simplement contacter directement le collectif par courriel) pour y accéder. Et même si l’on réduisait la diffusion à une définition quantitative, nos propres moyens se sont avérés plus efficaces – nous devons remercier nos camarades du mouvement anarchiste au Québec qui forment un réseau de solidarité incroyable.

Bref, à l’heure actuelle, il me semble que l’autoproduction et l’autodiffusion en dehors des circuits commerciaux soit la meilleure façon de faire vivre nos livres, c’est-à-dire qu’ils aient un impact quelconque même si c’est pour un temps limité. A contrario, un livre qui devient un bibelot dans un salon ou un simple bien de consommation dans les magasins et en ligne se transforme en marchandise – le livre est mort, le projet perd sa pertinence pour ses auteurs et autrices et encore davantage pour un collectif militant. Sur le plan financier, les sous obtenus par la diffusion par nos propres moyens nous ont permis de payer les factures de bien des activités et déplacements. Ce n’est pas les maigres redevances envers les auteurs et autrices des éditeurs qui font tourner les livres dans les circuits commerciaux qui nous auraient permis cela – et on voit qu’il n’y a parfois aucune redevance (0%) versée aux auteurs et autrices. Même si l’on donne beaucoup, il faut se rappeler qu’un collectif anarchiste autofinance entièrement son engagement dans les luttes par les contributions de ses membres. La diffusion par nos propres moyens nous a en plus permis de faire cadeau gratuitement d’une quantité considérable de nos livres à des groupes qui n’avaient pas les moyens de s’en procurer. Dans notre autodiffusion du Dictionnaire anarchiste des enfants, des contributions volontaires nous ont à ce jour permis d’en envoyer gratuitement pour mise à disposition des gens dans des ressources militantes diverses de : Bonaventure, Chicoutimi, Dunkerque (France), Exarcheia (Grèce), Gaspé, Joliette, Lac-Mégantic, Mashteuiatsh, Moncton (Nouveau-Brunswick), Montréal, Québec, Rimouski, Rivière-Trois-Pistoles, Sherbrooke, Saint-Bruno-de-Montarville, Saint-Jean-de-Matha, Saint-Junien (France), Ste-Anne-des-monts, Sept-Îles, Stoke, Ville-Marie (Témiscamingue) et même Whitehorse (Yukon). C’est une très belle illustration de solidarité 100% autonome rendue possible par le soutien de camarades libertaires des différentes régions du Québec, des soutiens qui nous ont également aidé à faire une tournée pour parler du livre à Chicoutimi, Saint-Valérien, Québec, Sherbrooke, Saint-Fulgence et bientôt plusieurs autres villes et villages.

Nous avons nous même sollicité l’Atelier de création libertaire pour la diffusion du Dictionnaire anarchiste des enfants en Europe. Plusieurs difficultés, dont les frais d’envoi, limitaient notre capacité à le diffuser outre-mer et il faut dire que peu de groupes militants européens répondaient à nos courriels. Le livre devrait être disponible en commerce en Europe à la mi-novembre. Pour les gens au Québec et au Canada, il nous semble plus intéressant que vous passiez par le collectif (via courriel au [email protected]) pour vous le procurer pour deux raisons pertinentes en plus des frais d’envoi : 1) les articles qui se référaient plus précisément aux réalités d’ici ont été retirés par l’éditeur de la version de France et 2) il est sans doute plus cohérent de soutenir directement (sans intermédiaire du marché) un collectif engagé dans les luttes ici. Pour les camarades en Europe, l’Atelier de création libertaire est un petit éditeur libertaire sans profit qu’il est aussi intéressant de soutenir. Le Collectif Emma Goldman reste disponible pour soutenir les camarades éloigné-e-s de nous qui souhaiteraient organiser des événements de discussion autour du livre (une manière de le rendre plus vivant que dans les tablettes de magasins). Nous pouvons par exemple fournir du matériel d’animation d’activités destinées aux enfants et aux adultes. Organisez un lancement près de chez vous, c’est dans les discussions que l’on partage que le petit ouvrage prend son sens. Encore une fois, contactez-nous via courriel au [email protected] . Nous ne recevrons rien de nos livres diffusés en Europe, mais nous sommes tout de même friands et friandes de comptes-rendus, de récits, de canevas de planification d’activité pédagogique et d’infos sur la façon que vous faites vivre le livre – c’est bien le but premier de notre démarche!

Enfin, j’aimerais dire que produire et diffuser un livre en dehors des circuits commerciaux est quelque chose de possible avec le soutien d’un bon réseau. Ça comporte plusieurs avantages pour un groupe militant même si c’est un peu plus de travail. On a à ce titre pu compter sur l’aide de plusieurs personnes pour la correction et les conseils ponctuels d’une camarade qui s’y connaissait en graphisme ont été précieux pour la mise en page du Dictionnaire anarchiste des enfants. Ce dernier livre a été réalisé à partir d’un logiciel de traitement de texte qui se trouve fort couramment sur les ordinateurs et d’une application en ligne gratuite de conversion de documents – preuve qu’il n’est pas nécessaire d’attendre d’avoir accès à des logiciels coûteux et dont l’utilisation est parfois longue à apprendre. Pour l’impression, plusieurs collectifs militants en font maintenant au Québec. Autrement, il est possible d’obtenir des coûts de production très raisonnables en consultant les micro-imprimeurs de différentes régions. Enfin, l’autoédition a ses avantages et ses inconvénients. On peut par exemple regretter que nos ouvrages autoédités jusqu’à maintenant n’aient pas de code ISBN et ne se retrouvent en conséquence pas dans les bibliothèques municipales.

Sébastien, militant du Collectif Emma Goldman




Source: Ucl-saguenay.blogspot.com