Durant une conférence de presse jeudi le 29 octobre dernier, le directeur général de Mission Bon Accueil, Sam Watts, a répondu à peu près ceci à un journaliste lui demandant comment le communautaire allait résister à la deuxième vague si ses travailleuses et travailleurs sont déjà à bout de souffle : « Oui mais pas sans difficulté. (…) C’est certain qu’il y a des gens qui sont épuisés et j’essaye le plus possible avec tous mes collègues et autre PDG d’encourager notre monde (…). Je pense qu’on serait capable de passer au travers se sont (les travailleuses et travailleurs du communautaire) des gens très résilients. Alors j’ai beaucoup de confiance. »
À elle seule, cette citation résume
bien ce que plusieurs organismes de Montréal vivent depuis bien longtemps, mais
encore plus violemment depuis le début de la pandémie, à savoir une ignorance
totale de la réalité du terrain par les directeurs et les conseils
d’administration.. Cette réalité est présente dans des
organismes comme les grands refuges, l’Accueil Bonneau ou encore des boîtes en
réduction des méfaits.
Sur le terrain, plusieurs
travailleuses et travailleurs avec qui nous entretenons des liens sont
désemparé.es devant l’ampleur de la tâche. Comment faire de la relation d’aide
avec des mesures de distanciation alors que la proximité est au cœur de
l’approche communautaire ? Comment se rendre au travail sans être découragé.e
en sachant très bien que les mesures mises en place le sont sans consultation
des équipes ? Comment se sentir valoriser dans son travail sans prime, sans
reconnaissance significative et continue du travail accompli depuis le début de
la pandémie et avec des tâches qui se sont souvent alourdies et complexifiées ?
C’est malheureusement des questions que se posent plusieurs travailleuses et
travailleurs qui, bien avant la crise sanitaire actuelle, travaillaient déjà
avec une surcharge, très peu de ressources et de reconnaissance. Ils et elles
se retrouvent donc dénudé.e.s de moyens et d’espoir pour la suite. Le burn out peut
rapidement devenir l’unique porte de sortie, mais il est loin d’être apaisant,
on le sait !
Depuis le début de cette pandémie,
aucune coalition patronale réclamant des meilleures conditions de travail a vu
le jour dans le milieu communautaire. Ces derniers prétendent pourtant appuyer
et encourager leurs travailleurs et travailleuses. Sauf que les mots ont leur
limite et les gens du terrain, c’est-à-dire les travailleuses et travailleurs
de rue, pair.es aidant.es, intervenant.es psychosocial.es et personnel
administratif, en ont assez de ces paroles en l’air et veulent un réel soutien.
Nous sommes épuisé.es par la surcharge de travail, le manque de soutien
clinique, et des conditions de travail précaires. Nous sommes écoeuré.es des DG
qui se complaisent dans un communautaire qui carbure à la vocation.
Nous comprenons que les directions
et membres de C.A, qui proviennent de plus en plus du milieu des affaires,
priorisent leurs intérêts personnels, comme le font depuis toujours les patrons
d’entreprises capitalistes. En ce sens, ils ne prennent aucun risque, aucune
action politique radicale pour sortir le milieu communautaire de sa précarité.
Ils semblent être bien confortables dans leur posture patronale faisant fi des
besoins de leurs employé.es.
Nous comprenons que ces organismes
adoptent davantage un mode de gestion collé à l’entreprise privée qui résonne
en ces temps de pandémie.
Nous comprenons que les directions
et membres de C.A sont de plus en plus déconnectés de la réalité du terrain et
des besoins non seulement des travailleuses et travailleurs, mais de ceux des
personnes fréquentant les services.
Nous réalisons que nos patrons/patronnes
parlent, parlent et parlent sans pour autant faire des actions concrètes pour
améliorer nos conditions de travail. Ils n’ont pas un problème de parole, nous
leur reconnaissons d’ailleurs un grand talent pour nous faire croire qu’ils
sont avec nous, mais leur inaction est honteuse pour les leaders qu’ils et
elles prétendre être.
Bref, avec leurs pseudo
encouragements, ces directions ne font que démontrer l’impertinence pour nous
toutes et tous, travailleurs et travailleuses, d’attendre qu’elles prennent les
devants pour améliorer nos conditions de travail. Il n’en tient qu’à nous de
prendre le contrôle de nos milieux de travail comme travailleuses et
travailleurs du communautaire et de mettre dehors nos patrons, patronnes.
#FuckTesEncouragementsSamPisTaGangDePDG
*La description de Monsieur Watts
sur le site de Mission Bon accueil : « Sam s’est joint à Mission Bon Accueil à titre
de directeur général en 2016. Il partage avec l’équipe sa vaste expérience en
direction d’équipes et en encadrement de leaders dans une variété de contextes.
Ses collègues le décrivent comme un dirigeant visionnaire, axé sur la création
d’un environnement favorisant l’innovation et la mise en œuvre de nouvelles
idées ».
En bref, « Sam » est un patron issu du milieu
des affaires.
Texte écrit par des militant.es travaillant
dans le communautaire
Source: Sitt.iww.org