En thĂ©orie, tout le monde est contre le viol. En pratique ? Nous vivons dans une sociĂ©tĂ© oĂč les violences sexuelles sont niĂ©es, minimisĂ©es et oĂč les victimes deviennent les suspectes pendant quâon trouve des excuses aux agresseurs. Ăa sâappelle la culture du viol et elle est transmise par la culture, lâĂ©ducation, les mĂ©dias, lâhumour, etc. La sociĂ©tĂ© est traversĂ©e par des reprĂ©sentations, des pratiques et des discours qui excusent, banalisent, Ă©rotisent voire encouragent le viol. En voici quelques exemples :
- « Le viol est un phénomÚne marginal » : FAUX
Chaque annĂ©e, en France, on compte 256 000 victimes de viol ou de tentative de viol : 208 000 femmes dont 124 000 mineures et 46 000 hommes dont 30 000 mineurs (INSEE â ONDRP, 2014 â 2012 et CSF, 2008). Un viol se produit toute les huit minutes. Le viol est bel et bien un phĂ©nomĂšne de masse.
- « Le viol est largement puni » : FAUX
La majoritĂ© des viols ne sont pas considĂ©rĂ© comme tel devant la Justice et certains commissariats refusent aux victimes leur droit de dĂ©poser plainte. Souvent le parcours de dĂ©pĂŽt de plainte et du procĂšs est trĂšs Ă©prouvant car ils met les victimes face Ă des policiers et des magistrats qui remettent systĂ©matiquement en cause leur parole. En France, 73% des plaintes dĂ©posĂ©es sont classĂ©es sans suite (INSEE â ONDRP, 2010 â 2015) et sur le reste la moitiĂ© sont dĂ©qualifiĂ©s en agressions sexuelles. Et toutes les procĂšs nâaboutissent pas Ă des condamnations, loin de lĂ : on parle de 1,5 Ă 2 % de lâensemble des viols seulement.
- « Le viol est le plus souvent commis par un inconnu dans une rue sombre » : FAUX
Dans lâimaginaire commun, un viol est le fait dâun inconnu dans une ruelle ou sur un parking dĂ©sert, la nuit ; le violeur a recours Ă la violence physique voire Ă une arme. « Ne rentre pas seule et pas trop tard », « Demande Ă quelquâun·e de te raccompagner », « Restez en groupe »⊠Tous ces conseils entretiennent le mythe en question. Ces cas existent, mais ils reprĂ©sentent seulement 20 % des agressions sexuelles. Dans les faits, 80 % des viols (94 % si on ne prend en compte que les victimes mineures) sont commis par des proches, membres de la famille ou partenaires. Ils se produisent majoritairement au domicile de la victime, sur son lieu de travail ou dâĂ©tudes, et la plupart ont lieu de jour (source : Zucker, 2005, CFCV, 2003).
- « Ce sont surtout les filles aguicheuses qui sont violées » : FAUX
La victime serait forcement une jolie jeune fille, sĂ©ductrice et provocante. LâĂ©ducation des jeunes filles (ou perçu·es comme telles) est fortement influencĂ©e par ce mythe : « Ne sors pas habillĂ©e ainsi ». En dĂ©coule des questions posĂ©es aux victimes de viol comme « Tu Ă©tais habillĂ©e comment ? Tu lâaurais pas un peu cherchĂ© ? » qui culpabilisent et font porter la responsabilitĂ© de lâagression Ă la victime plutĂŽt quâĂ lâagresseur. On continue aujourdâhui Ă apprendre aux filles à « ne pas se faire violer » plutĂŽt que dâapprendre aux garçons Ă ne pas violerâŠ
- « Les hommes ne peuvent pas contenir leur désir sexuel » : FAUX
On entend parfois que le viol serait dĂ» Ă la “misĂšre sexuelle” ou Ă une impossibilitĂ© pour certains hommes de satisfaire leurs besoins sexuels. On croit parfois que les hommes auraient plus de besoins sexuels que les femmes, alors quâaucune preuve sĂ©rieuse nâexiste Ă ce sujet. Le viol nâa rien Ă voir avec la sexualitĂ©, mais avec le fait dâexercer un pouvoir sur une autre personne. Ce qui provoque le viol câest le sexisme et la culture du viol, les blagues sur le viol qui rient des victimes et qui banalisent le viol, les films oĂč lâon voit une femme dire douze fois non quand le hĂ©ros essaie de lâembrasser, etc.
- « Quand une femme dit non elle pense oui ou peut ĂȘtre : elle a envie quâon la force » : FAUX
Les femmes comme toutes les autres personnes,si elles disent “non” câest quâelles pensent non. “Elle nâa jamais dit non”, “elle ne sâest pas dĂ©battue”. LâidĂ©e quâil faille prouver la contrainte exercĂ©e sur la victime pour pouvoir parler de viol est une aberration, car dans la trĂšs grande majoritĂ© des cas les victimes de viols sont en Ă©tat de chocs et de sidĂ©ration. Parfois il est impossible de dire non ou dâexprimer son consentement. Quand on a peur, quâon est sous emprise, quâon dort, quâon est inconsciente, quâon change dâavis, quâon est tellement sidĂ©rĂ©e quâon est bloquĂ©e…. ça veut dire non !
Câest lâensemble de ces comportements, idĂ©es-reçues, discours, et les centaines dâautres que nous nâavons pas la place de citer en exemple, qui font la culture du viol. Pour en sortir, il faut tous les Ă©liminer un par un.
Lorsque certains membres de la direction du collĂšge et de la hiĂ©rarchie acadĂ©mique gardent le silence face aux viols dont ils avaient connaissance depuis des mois, ils participent Ă cette mĂȘme culture du viol.
Lorsque que certains membres de lâĂ©quipe du collĂšge signifient Ă la mĂšre dâune victime que sa fille de 13 ans est Ă un Ăąge oĂč elle dĂ©couvre sa sexualitĂ© ou que comme elle est jolie il faut quâelle fasse attention, ils participent Ă cette mĂȘme culture du viol.
Lorsque La DĂ©pĂȘche parle “dâappĂ©tit sexuel” et de “jeux sexuelsâ” des adolescents pour dĂ©signer ces viols collectifs, ils participent Ă cette mĂȘme culture du viol.
Le Planning Familial 31 sâattache Ă dĂ©construire cette culture du viol auprĂšs des jeunes lors dâinterventions dans les Ă©tablissements scolaires.
Mais ce qui se passe aujourdâhui Ă Lamartine dĂ©montre une nouvelle fois quâil faut aller plus loin et alerte sur la nĂ©cessitĂ© que lâensemble de la communautĂ© Ă©ducative se forme sur les questions de violences de genre et de culture du viol. Sans quoi, la parole des victimes ou les signalements dâĂ©lĂšves tĂ©moins de ces violences ne seront jamais correctement entendus.
LâĂ©cole a un rĂŽle Ă jouer dans la lutte contre les violences de genre et la domination masculine mais pour cela, elle doit sâen donner les possibilitĂ©s. Il est urgent que des fonds soient dĂ©bloquĂ©s pour la mise en place , par des associations fĂ©ministes et compĂ©tentes sur le sujet de formations sur les violences de genre et le consentement tant pour les adultes que pour les enfants.
Pour que la culture du viol soit remplacée par une culture du consentement !
Source: Iaata.info