Quand le premier syndicat policier crĂ©e une cagnotte pour les agresseurs de Michel Zecler, qui aura encore le front dâaffirmer quâil ne faut pas stigmatiser le corps tout entier Ă cause de quelques brebis galeuses ? Câest lâoccasion de revenir sur un terme qui fait polĂ©mique : celui de racisme dâEtat.
Quand le premier syndicat policier crĂ©e une cagnotte pour les agresseurs de Michel Zecler, quâest-ce que ça dit de lâĂ©tat de la police ? Qui aura encore le front dâaffirmer quâil ne faut pas stigmatiser le corps tout entier Ă cause de quelques brebis galeuses ? Comment douter que le racisme est la rĂšgle, et que les policiers qui nây souscrivent pas sont les exceptions ?
Câest lâoccasion de revenir sur un terme qui fait polĂ©mique : celui de racisme dâEtat. On a beaucoup reprochĂ© aux thĂ©oriciens indigĂ©nistes de ne pas savoir dĂ©finir ce terme quâils emploient pourtant souvent. On comprend, ou on fait semblant de comprendre, quâil faudrait pour quâil y ait racisme dâEtat quâil y ait en France des lois raciales, sâappliquant diversement aux personnes Ă raison de leur origine ethnique ou de leur religion. Câest ne pas comprendre ce quâest lâEtat et faire mine de croire que le pouvoir ne sâexerce que par la loi.
Il y aurait sans doute plusieurs façons de dĂ©montrer lâexistence dâun racisme dâEtat. Mais sâil en suffit dâune, le racisme dans la police fera parfaitement lâaffaire. Combien de policiers ont des convictions racistes ? Nul ne le sait. Un nombre certainement consĂ©quent. Mais ce racisme des individus devient celui de lâinstitution tout entiĂšre puisque la solidaritĂ© de corps sâexerce, dans lâimmense majoritĂ© des cas, au dĂ©triment des victimes pour couvrir les agresseurs. Ainsi passe-t-on dâun racisme individuel Ă un racisme structurel, câest-Ă -dire un racisme qui structure les actions du corps tout entier, les quelques exceptions Ă©tant neutralisĂ©es par la masse.
Or lâEtat se rend complice de sa police en refusant de la sanctionner, parce quâil considĂšre que son image est indissolublement liĂ©e Ă celle de son bras armĂ©. Ainsi a-t-on entendu la secrĂ©taire dâEtat Sarah El HaĂŻry sermonner des jeunes : « Il faut aimer la police, car elle est lĂ pour nous protĂ©ger au quotidien. Elle ne peut pas ĂȘtre raciste, car elle est rĂ©publicaine ! » Mais lâEtat ne peut couvrir sa police quâen chargeant Ă son tour les victimes. Le prix du dĂ©ni du racisme est donc lâĂ©laboration dâun discours raciste, chaque crime policier se transformant en un portrait Ă charge de la victime. Plus la police frappe et plus les noirs et les arabes sont toxicomanes, dĂ©linquants, fous et violents. Ainsi les citoyens sont-ils Ă leur tour mis face Ă un choix : croire en leur Etat et reprendre Ă leur compte ses discours racistes, ou croire les victimes et rompre avec lâEtat. On pourrait donc dĂ©finir le racisme dâEtat comme une idĂ©ologie qui est indisssociable de lâacceptation de lâautoritĂ© de lâEtat, idĂ©ologie dont lâenjeu premier est la lĂ©gitimitĂ© de la violence exercĂ©e au nom de lâEtat par la police.
Si câest lâEtat tout entier qui est structurellement raciste et, par extension, la sociĂ©tĂ© entiĂšre qui est sommĂ©e de lâĂȘtre, câest donc la police qui est le coeur de ce racisme. Câest dâautant plus vrai que tout indique que lâEtat lui-mĂȘme a peur de sa police. Si les citoyens parvenaient, par un miracle de la vie Ă©lectorale, Ă reprendre pied dans lâappareil dâEtat, il faudrait quâils soient prĂȘts Ă mener la lutte contre un corps armĂ© qui ne cesse de manifester ses vellĂ©itĂ©s dâinsubordination.
On se souvient tout dâun coup que le sort des rĂ©volutions dĂ©pend souvent de la façon dont lâarmĂ©e se positionne face Ă la police. Au fait, comment se porte lâarmĂ©e française…?
Par Olivier Tonneau
Source: Demainlegrandsoir.org