En novembre 1916, Lecoin sort de prison. Pierre Martin vient de mourir. Quelques jours aprĂšs sa libĂ©ration, le 3 dĂ©cembre, Lecoin se rend Ă une rĂ©union au local du journal de SĂ©bastien Faure C.Q.F.D. Il prend Ă parti le tribun anarchiste, lâaccusant de continuer Ă faire paraĂźtre un journal censurĂ© et dâĂȘtre trop timide face aux socialistes et au gouvernement en raison de ses attaches avec les partis non anarchistes et de ses accointances
[1]. Alphonse BarbĂ©, alors dĂ©serteur, tĂ©moin de la dispute, rapporte : SĂ©bastien Faure, quâil accuse devant une centaine de camarades libertaires, non seulement de trahir la paix, mais dâĂȘtre vendu au gouvernement, ceci parce que Malvy, ministre de lâIntĂ©rieur, avait mis SĂ©bastien Faure en demeure de cesser sa propagande pacifiste, car il y allait de la vie dâun certain nombre de soldats des tranchĂ©es, dans les paquetages desquels on avait trouvĂ© des tracts contre la guerre, signĂ©s SĂ©bastien Faure ; placĂ© en face de cette situation tragique et de ses responsabilitĂ©s, SĂ©bastien Faure accepta de suspendre sa campagne pour la paix ; câest pour ce geste dâhumanitĂ© que Lecoin tenta de fustiger ce dernier, il ne fut pas suivi par lâassemblĂ©e qui arbitrait le dĂ©bat
[2].
Lecoin, plus tard, regrette ses accusations : Ma jeunesse et mon impĂ©tuositĂ©, mon inexpĂ©rience, me rendirent injuste envers lui Ă qui je reprochais, avec vĂ©hĂ©mence, ce que jâappelais ses coupables mĂ©nagements Ă lâĂ©gard des
[3].anarchistes de guerre
De nouveau en prison, pour insoumission, Lecoin et dâautres dĂ©tenus politiques de la SantĂ©, rĂ©digent en juin 1917 un numĂ©ro clandestin du Libertaire , ainsi quâun peu plus tard, un manifeste, peut-ĂȘtre le premier, soutenant les maximalistes de LĂ©nine.
Lâarmistice signĂ©, Le Libertaire rĂ©apparaĂźt Ă partir de janvier 1919. Lecoin, toujours en prison, y collabore dĂšs les premiers numĂ©ros sous le pseudonyme de Leonic. Conscient de lâinefficacitĂ© du mouvement en 1914, il Ă©crit un article intitulĂ© « Organisons-nous » oĂč il appelle Ă la constitution dâune organisation anarchiste [4].
Son opinion est importante pour le mouvement libertaire. Lecoin est un martyr quâil convient de faire libĂ©rer. Le Libertaire mĂšne une campagne et publie une brochure [5] Louis Lecoin est devenu pour nous jeunes libertaires, jeunes syndicalistes, un exemple Ă suivre. Il nous avait dĂ©montrĂ© quâon pouvait ĂȘtre Ă la fois syndicaliste, libertaire et anti-militariste
[6].
Le Libertaire doit attendre jusquâĂ la fin novembre 1920 pour titrer sur trois colonnes Ă la une « Lecoin libĂ©rĂ© » [7]. Il vient de passer huit annĂ©es en prison !
Source: Partage-noir.fr