Ca y est. On a votĂ© [1]. Pour Jean-Luc MĂ©lenchon, en dĂ©pit de tout [2] ce qui faisait quâon nâavait pas envie de voter pour lui.
Ce nâest pas quâon se soit rendu aux ahurissantes sommations â et autres invectives â de la frange exaltĂ©e de son fan-club qui sĂ©vit sur Twitter : tout au contraire, les procĂšs en « bourgeoisie » et en « droitisme » intentĂ©s contre quiconque osait rappeler certains errements de lâintĂ©ressĂ© auront Ă©tĂ©, jusquâau bout, le plus efficace des repoussoirs.
Si on a votĂ© pour lui, câest parce que câĂ©tait, Ă lâĂ©vidence, un choix cohĂ©rent â pour qui redoute rĂ©ellement la possibilitĂ© dâune victoire prĂ©sidentielle de la candidate du parti qui fut cofondĂ© par (entre autres) un ancien Waffen SS et un ancien milicien, et qui, un demi-siĂšcle plus tard, « porte », selon le sociologue Ugo Palheta – et nonobstant sa « dĂ©diabolisation » par une mĂ©diacratie Ă laquelle nous devrons Ă©videmment demander des comptes -, « un projet fasciste » [3]. Ou, pour le dire autrement â et pour reprendre le titre dâun livre important : la possibilitĂ© du fascisme [4]
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Seulement voilĂ : ce vote nĂ©cessaire nâa hĂ©las, et comme on le craignait, pas suffi. Et cette fois : Le Pen risque vraiment de lâemporter le 24 avril. Or : aprĂšs avoir appelĂ© au vote « efficace » au premier tour, MĂ©lenchon, dĂ©fait, sâest encore une fois contentĂ©, comme en 2017, de demander Ă ses troupes, de ne « pas donner une seule voix Ă madame Le Pen » au second tour. En dâautres termes : il ne leur demande pas explicitement de votre contre cette derniĂšre. Câest-Ă -dire : pour Macron [5].
Entendons-nous bien : nous savons tou·tes pertinemment – on lâa Ă©crit cent fois ici – que le chef de lâĂtat sortant nâa cessĂ©, depuis son Ă©lection, de damer une route devant lâextrĂȘme droite. Nous savons quâil est, selon le mot de FrĂ©dĂ©ric Lordon, un « fascisateur ». Mais pour autant – et si du moins les mots ont encore un sens -, il faut lâĂ©noncer nettement : lâautoritarisme capitaliste dâEmmanuel Macron, pour odieux quâil soit, nâest pas un fascisme. Et cela fait une Ă©norme diffĂ©rence pour celles et ceux qui seraient de toute Ă©vidence les toutes premiĂšres victimes dâune victoire de son adversaire et de la mise en Ćuvre de son programme nationaliste : on pense bien sĂ»r aux migrant·es et aux musulman·es – puis Ă tant dâautres encore.
Disons-le, dĂšs lors, plus distinctement : contre la porteuse dâun tel projet, lorsquâelle est si proche dâune victoire au second tour, il nâest possible ni de sâabstenir, ni de voter blanc. Car ces deux options la propulseront mĂ©caniquement vers lâĂlysĂ©e.
La mĂȘme – exactement la mĂȘme – dĂ©termination qui nous a fait voter pour Jean-Luc MĂ©lenchon devrait donc nous faire voter pour Emmanuel Macron – sans plus dâĂ©tats dâĂąme, et sans aucune illusion sur le personnage : quiconque ferait un choix contraire devrait sans doute en rabattre sur de futures exhortations au vote au « vote utile » – ou « efficace ».
Source: Lmsi.net