Moins de fric pour le public mais plus de flics
Cela fait des annĂ©es que des soignants surmenĂ©s demandent plus dâeffectifs, plus de lits, plus de fonds pour lâhĂŽpital public. Entre grĂšves, burn-outs et accidents du travail, les signes de dĂ©tresse ne viennent pas inflĂ©chir la doctrine nĂ©o-libĂ©rale du gouvernement : brader le secteur public Ă tout prix. Si lâĂ©mergence dâune Ă©pidĂ©mie vient critiquer en acte le dĂ©sastre que reprĂ©sentent ces politiques pour la santĂ© publique, le gouvernement ne semble pas prĂšs de changer de cap. Il prĂ©fĂšre enfermer plutĂŽt que guĂ©rir, financer des mesures rĂ©pressives plutĂŽt que sanitaires [1]. En 2019, 3 400 lits dâhĂŽpitaux ont Ă©tĂ© fermĂ©s, dans la lignĂ©e des 100 000 qui ont disparu en 20 ans [2]. Si au cĆur du confinement de mars dernier, le gouvernement sâĂ©tait gargarisĂ© dâune augmentation de 5 000 Ă 14 500 lits [3], force est de constater que ces promesses nâont pas Ă©tĂ© tenues : seulement 7000 avaient finalement Ă©tĂ© mis en place, et en octobre nous voilĂ retombĂ©s Ă 5000 lits de rĂ©animation opĂ©rationnels, « faute de personnel » (lire : faute de moyens) [4]. Refaire les mĂȘmes inepties, câest de lâobstination. Alors que le couvre-feu ne cesse de sâĂ©tendre, 100 lits viennent dâĂȘtre fermĂ©s au CHU de Nantes [5]. Faut-il rappeler que si des pays comme lâAllemagne ou la Suisse ont mis en place des mesures moins rĂ©pressives au printemps 2020, ce nâest pas en raison dâun moindre taux de contagion mais de mortalitĂ©, parce que leur systĂšme de santĂ© a Ă©tĂ© moins durement touchĂ© que le nĂŽtre par les restructurations Ă©conomiques [6] ?
A qui profite la crise ?
Au lieu de faire amende honorable, les politiques se jettent sur les possibilitĂ©s que leur offre cette crise comme la vĂ©role sur le bas clergĂ©. Un essai datant de 2007 a beaucoup Ă©tĂ© citĂ© ces derniers temps, La StratĂ©gie du Choc [7]. La journaliste Naomi Klein y explique comment les restructurations appelĂ©es par les Ă©conomistes nĂ©o-libĂ©raux de lâĂ©cole de Chicago, qui souhaitent au dĂ©triment des populations dĂ©lester les Ă©tats-providence de leurs derniĂšres politiques sociales, sont plus facilement applicables dans des moments de choc (ouragan, tsunami, guerre, attentat terroriste, coup dâĂtat militaireâŠ) quâau coup par coup, en taillant dans les retraites, les aides sociales ou en privatisant le transport, les Ă©coles, les Ă©tablissements de santĂ©.
Notre propos nâest Ă©videmment pas de suggĂ©rer que des Ă©minences grises auraient volontairement introduit le virus en Chine pour manipuler le monde, comme tendent Ă le caricaturer les voix de lâestablishment en taxant toute opposition de complotisme. Cependant, il est facile de voir que la numĂ©risation du monde, secteur de pointe du dĂ©veloppement Ă©conomique qui rencontre toujours des rĂ©sistances parmi les populations, Ă fait de grands pas avec le choix politique du confinement et les nouvelles restrictions actuelles de dĂ©placement et dâusages. Le tĂ©lĂ©travail, qui Ă©vite aux entreprises des frais de location de bureau et surtout rend presque impossible lâorganisation des travailleurs, sâest largement rĂ©pandu. Le paiement par carte bleue progresse contre lâutilisation dâargent liquide, et les recettes des magasins de vente en ligne ont bondi, laissant apercevoir le spectre de transactions monĂ©taires entiĂšrement virtualisĂ©es qui rendent tout achat traçable. Les lieux de rencontre, bars, théùtres, Ă©coles, universitĂ©s, se font fermer, remplacer par le la pĂ©dagogie ou de la sociabilitĂ© en ligne, nous laissant tous isolĂ©s, stupĂ©faits, et sans force de rĂ©action collective. La reconnaissance faciale gagne du terrain : permettant une identification sans contact des voyageurs, elle se dĂ©veloppe dans les aĂ©roports, lĂ©gitimĂ©e comme les nouvelles camĂ©ras thermiques par la crise sanitaire [8]. Dans des pays comme la Chine oĂč son usage est dĂ©jĂ gĂ©nĂ©ralisĂ©, les logiciels nourris de millions dâimages de personnes masquĂ©es qui ont fleuri sur les rĂ©seaux sociaux deviennent plus performants pour reconnaĂźtre un individu seulement avec le haut de son visage [9].
Alors que des millions de travailleurs se sont retrouvĂ©s au chĂŽmage et que les personnes vivant dâĂ©conomie informelle ont sĂ©rieusement Ă©tĂ© atteintes par les interdictions de dĂ©placement, que 150 millions de personnes dans le monde sont passĂ©es sous le seuil de lâextrĂȘme pauvretĂ© Ă cause de la gestion de lâĂ©pidĂ©mie, les grands gagnants de la crise sanitaire sont sans surprise les ultra-riches, avec Ă leur tĂȘte les grand patrons du numĂ©rique (Tesla et SpaceX, Amazon, Facebook, Alibaba, Microsoft). Elon Musk, par exemple, a quadruplĂ© sa fortune, atteignant les 103 milliards de dollars [10].
Au Chili, au Liban, en AlgĂ©rie, Ă Honk Hong, en France, confiner les population a permis aux autoritĂ©s de sĂ©rieusement mettre Ă mal les manifestations massives qui entravaient leurs manĆuvres
et pourrissaient leur crédit électoral depuis bien trop longtemps à leur goût.
Par ailleurs, lâaugmentation de la mise au chĂŽmage forcĂ©e renfloue doucement mais sĂ»rement lâarmĂ©e de rĂ©serve du capital, dont lâ image serait une longue file dâattente de personnes sans emploi toquant aux portes aux entreprises, ce qui leur permet de virer qui moufte un peu trop et de modifier les conditions de travail Ă leur avantage.
Travaille, consomme et ferme ta gueule !
LâabsurditĂ© des mesures imposĂ©es pour lutter contre lâĂ©pidĂ©mie en agaçait dĂ©jĂ plus dâun. Ainsi, on apprenait avec les dĂ©crets gouvernementaux qui nous pleuvaient dessus comme des fientes de pigeon que le virus Ă©tait moins transmissible dans les bars que dans la rue, en position assise quâen position debout pour aller rĂ©gler lâaddition, que lâon pouvait contaminer nos semblables en marchant sans masque dans la montagne et que les magasins, mĂ©tros et lieux de travail offraient moins de contacts entre les personnes que les soirĂ©es Ă©tudiantes. Avec le couvre-feu (le plus restrictif dâEurope, soit dit en passant), le cynisme est portĂ© Ă son comble. Le gouvernement assume quâil veut sauver lâĂ©conomie en laissant les entreprises tourner et les magasins ouverts, mais que tous les espaces de sociabilitĂ©, de rencontre, de sport et de culture sont dispensables. AprĂšs tout, Ă quoi cela sert-il de faire autre chose que travailler ou faire ses courses entre six et sept au supermarchĂ© ? Câest dans cette lignĂ©e que lâon entend maintenant parler dâun potentiel couvre-feu Ă 19h, Ă©tendu au week-end.
Dans ces conditions, il est plus que logique de se rĂ©volter. DĂšs lâinstauration du couvre-feu, le 17 octobre, de petites manifestations sauvages ont eu lieu Ă Paris et Ă Marseille. A Naples, oĂč les contrats de travail font figure de saint Graal et oĂč le couvre-feu met immĂ©diatement les gens dans la merde, des Ă©meutes ont eu lieu vendredi 23 au soir. Des pillages de supermarchĂ© avaient dĂ©jĂ eu lieu pendant le confinement, comme aux Ătats-Unis, ce qui avait permis lâobtention de quelques aides sociales. Si on ne veut pas ĂȘtre muselĂ©s, baillonnĂ©s, subir des interdictions de sortie et des mesures de guerre pendant les 10 prochaines annĂ©es, il est urgent de protester dans la rue et partout ailleurs !
RDV SAMEDI SOIR Ă 18H A SAINT AUBIN !
Source: Iaata.info