lâEtat est un homme en costume dâun peu plus de quarante ans et ses subalternes
eux et elles, et bien ils et elles ne mettent pas forcément de costumes
câest leur droit de subalternes
une secrétaire prend des notes ou un ordinateur
le manutou il a dit que ça nâouvrirait pas alors ça nâouvre pas
alors ce lundi-lĂ il y a donc des subalternes qui arrĂȘtent de faire marcher la machine
aucune institutions scolaires
grandes grilles ou petites grilles fermées
les clĂ©s de la ville nâouvriront rien
ni crĂȘches, ni Ă©coles publiques, ni privĂ©es
ni cités scolaires, ni collÚges, ni lycées, ni
pĂŽles nords universitaires et pĂŽles suds universitaires
et ça nâouvrira pas, ni lundi, ni mardi, ça nâouvre pas
ni le mercredi ni tous les jours qui suivent alors ça se passe comme avant
sans lâhorrible travail
dehors ça traßne
et le lundi et le mardi et le mercredi et les jours suivants ça reste fermé
alors ça traßne
ça disparaßt tellement facilement du monde dehors les adultes
celles et ceux qui grandissent encore se touchent les épaules
et ça fait traĂźner les pattes au-dessus dâun muret
lascifs et lascives regardent les bagnoles passer
lascifs et lascives ont pris des notes et ils et elles ont notĂ© quâil fallait
révéler cette ùme généreuse
les temps sont durs, le mot Ăąme ne traĂźne pas si facilement dans les poĂšmes de nos jours
ils et elles ont notĂ© quâil fallait
inventer dans cette période de nouvelles solidarités
« OK, alors », quâils et elles se disent les lascifs et lascives
« on se retrouve demain »
alors le lendemain
petit saut du muret et ils et elles sortent des maisons, des immeubles, des bosquets, comme des rats, de partout
il nây a pas de joueur de flĂ»te pour guider les petits rats qui descendent le long de la dĂ©partementale
toutes tĂȘtes de tous les Ăąges
ils et elles mangeront dans leurs mains laissant les bouches tùchées un peu dÚg
la route est longue
le dernier son de Kekra passe sur la petite enceinte au moment du départ
grùce à quoi on chaloupe la randonnée vers la grande ville
absolument aucun but et aucun sens
glùner autres gosses comme jolies plantes pour que ça grandisse
caravanes bruyantes qui partent tout dans les sens et arrachent
le monde adulte en traversant oĂč elles passent
les clĂ©bards nâaboient pas, ils chantent
et celles et ceux qui grandissent pas encore devenu-e-s lascives et lascifs
rejoignent la danse pas trop macabre, les semelles chauffent les départementales
ça rapplique par grappes de partout et
au fur et Ă mesure croisade se constitue et gamins avec
vieux foulard avec t-shirt 70âs america
ou jogging dortmunt / milan ac ou jeans
un peu troués délavés et juppes pas plissés
sacs de bouffe pas chĂšre et
ça grossit
et que ça gueule, le dehors ne fait pas de bruits quand le cortÚge fend
le désert
lĂąchant crachouillis , vieuxfonds gras de gorges en rĂąclant bien
pour éloigner adultes et flicailles bleusailles
rĂąclant quelques secondes glaviots translucides probablement
un peu covidé-19
ça disparaßt tellement vide le monde adulte et les subalternes qui le tiennent
oui, un 1 et un 9 avec les deux mains, ce ralliement-lĂ
le signe tourne au-dessus de leurs tĂȘtes via les satellites
le covid 19 ne va pas Ă lâĂ©cole, il trouve ça pourri
caravanes gamines se disloquent, et se reforment, et se disloquent
et se noient dans nouvelles, pillent, dimunient et grossit
se disloquent et se noient dans nouvelles, continuent de grandir
câest le sens et le but
les rats ne se noient pas dans le courant de flotte car personne ne les guide
le monde adulte ne respire pas lorsque lascifs et lascives le
fendent enfin, lascifs et lascives continueront avec groove
cette idĂ©e difforme de lâensauvagement de celles et ceux qui grandissent
et apprennent encore
Source: Lundi.am